NON NOBIS DOMINE, NON NOBIS, SED NOMINI TUO DA GLORIAM
L'ordre religieux et militaire du Temple de Jérusalem marqua l'histoire de l'Europe et de l'Orient aux XIIe et XIIIe siècles. Cependant, si son ascension fut spectaculaire, sa chute fut brutale et tragique. Les héros des croisades, à la fois moines et soldats, agriculteurs et architectes, banquiers et diplomates furent écrasés comme hérétiques et criminels.
Le Temple va défricher landes et gastines, drainer biefs et marais, revaloriser terres et domaines à partir de connaissances et de techniques nouvelles. Car l'implantation des maisons, subordonnée aux donations, avait pour but de créer des unités de production. Celles-ci étaient capables de faire vivre les Frères qui les gouvernaient mais surtout, fournissaient un surplus financier destiné à alimenter et soutenir l'action en Terre Sainte. L'élevage tenait une place importante et les Templiers étaient soucieux d'acquérir des pâturages.
L'Ordre du Temple s'établit d'une part dans toute la chrétienté et d'autre part sur les fronts de combats avec les Musulmans et Maures. Certains auteurs annoncent un chiffre exagéré de 9000 commanderies en Occident. En fait, sur le territoire de l'actuelle France, environ 600 véritables commanderies ont vu le jour.
L'organisation administrative s'établit sous forme de Provinces. Les divisions territoriales ignoraient les frontières des États, surtout en France. La Règle nous signale quelques-unes de ces provinces, mais, au cours du XIIIe siècle, certaines centralisations durent éclater. C'est ainsi que l'on compte dix-sept provinces : quatre en Orient, quatre pour la Péninsule Ibérique, quatre en Europe, et cinq en France. Chaque Province était découpée en Baillies (baillia), soit selon la géographie régionale, soit en fonction de l'opportunité militaire ou routière.
La Baillie porte le nom de la préceptorie principale, car elle regroupe des préceptories ou maisons à vocation rurale ou urbaine. L'appellation de commanderie ne viendra pour les établissements du Temple que lors de leur rattachement à l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalen en 1312.
L'implantation des châteaux et forteresses s'effectua sur toutes les frontières, formant ainsi une barrière de défense. Vers le sud, les Templiers s'étaient installés surtout aux points stratégiques défendant tant les terres que les côtes de la méditerranée, comme Tartosa, Cervera. En Orient et partout où la défense de la chrétienté l'exigeait, les châteaux, fortins et redoutables citadelles, étaient construits sur des promontoires rocheux qui dominaient et contrôlaient les routes alentours.
Aux revenus des domaines et aux dons s'ajoutaient les tributs imposés aux musulmans. Mais le Temple ne disposait pas en Orient de sommes faramineuses. Pour prêter, ils devaient transférer des fonds par "portage" de monnaie sur des navires de l'Ordre, par la Méditerranée. Parfois, ils empruntaient aux autres banquiers (italiens, etc.).
LA NAISSANCE DE L'ORDRE DU TEMPLE
Après la fondation du royaume chrétien de Jérusalem par Godefroy de Bouillon et ses croisés, 9 chevaliers français décidèrent de s'installer, en 1118, en terre sainte dans le but de créer un ordre à la fois monastique et militaire. Devant le patriarche chrétien de Jérusalem, les neuf firent vœux de chasteté, pauvreté et obéissance. Voila qui fit d'eux des religieux bien qu'ils n'en avaient pas l'habit. Etant des soldats, ils s'occupèrent de la sécurité des routes menant à Jérusalem.
L'ordre s'agrandit rapidement et parmi les 9 fondateurs Hugues de Payns fut élu chef. 10 années après la fondation on pouvait déjà compter 300 chevaliers du Temple commandant une milice de trois mille hommes. Il faut noter que parmi eux il n'était pas rare de trouver des excommuniés désireux de se réhabiliter ou de se faire oublier. Vivant exclusivement de dons, on leur donna le nom de "pauvres chevaliers du Christ ".
Ce furent les Cisterciens qui guidèrent les premiers pas de l'ordre du Temple et notamment le soutien accordé par leur chef saint Bernard que l'on surnommait "l'arbitre des rois et des papes" tant son influence était grande. Il permit à l'ordre du Temple d'obtenir la reconnaissance officielle par le pape Honorius II. La tenue des chevaliers devint alors un blanc manteau frappé d'une croix rouge sur le cœur.
LA REGLE DES TEMPLIERS
Il existe de nos jours encore 3 exemplaires de la règle des Templiers dans lesquels l'organisation hiérarchique y est décrite en détail. La confrérie était très fermée et seules les personnes nobles de naissance pouvaient accéder au pouvoir. Tous les membres de l'ordre étaient liés à la règle, à leur tête se trouvait le Grand Maître siégeant à Jérusalem.Le Grand Maître ne possédait cependant pas les pleins pouvoirs et les décisions étaient prises avec le chapitre (l'assemblée). En dessous du grand maître il y avait le sénéchal, l'assistant du Grand Maître, le maréchal, le chef de guerre, le commandeur, le trésorier de la communauté.
La règle était souple sur certains points. Dans certains cas il était possible aux hommes mariés de faire partie de l'ordre et il était même déconseillé de pratiquer l'abstinence absolue qui eût rendu les chevaliers inaptes au combat. Mais la règle assurait à l'ordre de nombreux privilèges : en effet, il était exempt d'impôt mais pouvait en percevoir. Il pouvait rendre sa propre justice dans ses possessions tout en possédant l'immunité judiciaire. Il possédait son propre clergé et les évêques n'avaient aucune autorité sur eux. Seul le pape a une autorité supérieure au Grand Maître. Voilà les dispositions exceptionnelles qui permirent aux Templiers d'acquérir une formidable puissance en Orient, puissance qui s'étendit ensuite à l'Europe.
LES TEMPLIERS ET LES AUTRES ORGANISATIONS
Deux autres ordres à la fois religieux et militaires sont nés des suites des croisades.
Le principal rival des Templiers était "l'Ordre des chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem", ou "Hospitaliers", qui existent toujours de nos jours sous le nom de "l'Ordre de Malte".
Créé en 1100, il se consacra dans ses débuts à soigner les pèlerins malades. Mais, tout comme les Templiers, les Hospitaliers se dotèrent d'une armée. Au combat, les chevaliers Templiers en manteau blanc à croix rouge combattaient aux cotés des chevaliers Hospitaliers en manteau noir à croix blanche. Mais il n'était pas rare de voir les deux ordres se concurrençer à qui prendrait le premier une ville, soit pour l'honneur, soit pour le butin.
Voir : L'ordre de Malte
Le second ordre entrant aussi en concurrence était celui des "chevaliers Teutoniques". Ordre fondé en 1190 et qui était composé exclusivement d'allemands habillés en manteau blanc frappé d'une croix noire.
L'ARGENT DES TEMPLIERS
Dès sa fondation, l'ordre du Temple avait bénéficié de nombreuses donations : il y eut d'abord celles des nobles qui, ayant revêtu le blanc manteau et fait vœu de pauvreté, lui apportèrent tout ou partie de leurs biens. Puis ce sont les princes et les rois qui lui offrirent des fiefs ou d'importantes sommes d'argents en récompense de ses services. Ainsi, régulièrement les Templiers se voyaient octroyer d'imposantes richesses comme des châteaux, des trésors, des villes et même des royaumes entiers. Tous les plus grands nobles, allant jusqu'aux rois d'Angleterre et de France, donnaient aux Templiers.
Les Templiers savaient très bien gérer leurs richesses et les administrateurs de l'ordre faisaient fructifier leurs biens. Les Templiers ont donc inventé le métier de banquier et avaient créé, en plein Moyen Âge, un système bancaire perfectionné où il était possible de réaliser la plupart des opérations modernes: ouverture de compte, avances, cautions, consignations, transfert internationaux de fonds.
Leurs principaux clients étaient des riches marchands qui commerçaient avec l'Asie. Puis, ceux que l'on nommait les "pauvres chevaliers du Christ" se verront confier par les rois de France et d'Angleterre la garde et l'administration du trésor public, par les papes la gestion du denier de saint Pierre et celle des fonds destinés à financer les croisades.
On estime que les revenus annuels moyens des Templiers s'élevaient au XIIIe siècle à 112 millions de livres, c'est-à-dire à peu près 15 milliards d'euros actuels. On disait qu'ils pratiquaient l'alchimie et qu'ils avaient trouvé la pierre philosophale permettant de fabriquer de l'or. On est presque sûr de nos jours que les Templiers pratiquaient l'alchimie, art que l'on disait à la fois science et magie.
LA FIN DE L'ORDRE
La perte de Jérusalem inaugura le lent déclin de l'entreprise chrétienne en Orient, malgré les rares victoires comme la prise de Saint Jean d'Acre en 1191. En 1229 les croisés réussirent à convaincre le sultan de leur rendre la ville sainte pour 10 ans. Mais en 1244 les turcs chassèrent les occupants de Jérusalem après l'avoir dévasté.
Dans les années qui suivirent, les chrétiens perdirent petit à petit leurs possessions et en 1291, soit un siècle après sa prise, le sultan égyptien les chassa de la ville de Saint Jean d'Acre. L'épopée militaire des Templiers s'acheva ici. Le grand maître élut domicile dans le Temple de Paris qui devint le chef-lieu de l'ordre.
Le 13 octobre 1307 à l'aube, les baillis et sénéchaux du roi de France, Philippe IV, ouvrent les lettres closes que le Conseil royal leur a fait parvenir quelques jours avant et qui leur donnent l'ordre d'arrêter tous les Templiers vivant dans le royaume. Malgré les protestations, de moins en moins convaincues, du pape Clément V, qui voudrait se saisir de l'affaire, les agents du roi, menés par Guillaume de Nogaret, obtiennent par la torture les aveux qu'ils souhaitent obtenir : corruption de l'ordre, hérésie, reniement du Christ... Il faut déconsidérer le Temple pour forcer le pape à le dissoudre. En 1310, le roi fit brûler vifs 54 Templiers comme relaps et 36 autres moururent sous la torture. Le pape, cédant à ces pressions, prononça la dissolution de l'ordre le 3 avril 1312. Les biens de l'ordre sont dévolus aux Hospitaliers, partout en Europe, sauf en Espagne, où un nouvel ordre est créé pour recueillir l'héritage. Le 18 mars 1314, le maître du Temple Jacques de Molay et l'un de ses compagnons montent sur le bûcher à Paris.
Il semble qu'il faille lier la disparition des Templiers à la politique antipontificale de Philippe le Bel. Les accusations portées contre l'ordre ne tiennent pas. Mais il était impopulaire, à cause de sa richesse ; on lui reprochait l'échec de la croisade, ce qui est bien exagéré. Les Hospitaliers, grâce à leurs activités charitables, échappaient en partie à ces reproches. Aussi était-il tentant de profiter de cette impopularité pour charger le Temple et se présenter en défenseur intraitable de la foi face à un pape hésitant. Une autre raison peut expliquer le drame : l'orgueil du Temple était connu ; son indépendance à l'égard de la royauté de Jérusalem aussi.
De nos jours certains mouvements se réclament du Temple. Or l'ordre du Temple de l'histoire exotérique n'est plus. Il est certain qu'il existe des héritiers de l'âge d'or de l'Ordre du Temple; il est certain aussi que des ordres partagent aujourd'hui les mêmes valeurs mais il n'est pas indiqué de croire sur parole ceux qui affirment être en possession de cet héritage.
SOURCES ET LIENS
Mythes-et-legendes.net
Lycos.fr/insolite/templiers