La profanation
- Détails
- Catégorie : Littérature
La profanation
Il y avait là comme des rêves opiacés, des fumerolles légères et moirées de règnes adventices, un pouvoir circonscrit opérant dans des règles ne tenant ni de l’honneur, encore moins de la morale, son but étant de circonscrire tout ce qui est, afin par une illégitimité forcenée, de parvenir à ce but le plus exprimé : le Pouvoir global. Un Pouvoir inscrit pour certains, un Pouvoir recherché pour d’autres, un Pouvoir initié pour les derniers.
Et dans les nuées qui se précisaient, comme des nefs anciennes, coulées par les vents antiques, se dressaient des verbes pour enhardir cette profanation. Car profanation était le symbole même de cet aréopage se présentant devant nos yeux. Ce n’étaient que rires et dévastations d’enluminures, des brumes de colères où les ripailles s’évertuaient, confluant vers cette dérive de l’intelligence menant à l’atrophie la plus réelle, voyant des êtres, hier, devenus des bêtes alimentées par leurs songes diaprés d’or et de serments de mort.
La pluie tombait, drue, sur cette aubaine de mésalliance parée de toutes les discordes, les unes les autres dans ce convent illuminé par les nuées, enchantaient cette gloire à venir voyant la fin des chaînes de la Loi Humaine les emprisonnant et les laissant, là, à la grève, comme des marins sans barques, des écheveaux de poissons amarrés à l’invraisemblable, le nuage mauvais par essence. Hirsutes personnages décorés de chétifs tissus aux soieries dormantes, se prévenant les uns en conférences secrètes, les autres en bavardages stériles, nous parvenant dans la lucidité d’une seconde, ce court moment où ne peuvent s’empêcher les libidineux de s’encenser, rêvant le monde par ci, le monde par-là, comme si le monde les attendait, tous ces dévots d’une piétaille incoercible.
Je musais le long de ces aigreurs, de ces vitupérations, de ces ordonnances, de ce bouquet d’honneur aux trois bans d’une acclamation, voyant entrer en tablier de boucher le réceptacle de tout ce brouet, en déshonneur le plus total avec sa caste reniée, cette aristocratie plénière ne regardant en aucun cas cette gabegie humaine. Il me fallait supporter toutes les inconséquences de cette bouillie lavée et engagée au tabernacle hostile, dont le rictus se montrait sur ces visages courroucés, ces yeux surgissant une haine invraisemblable pour tout ce qui ressort de l’Ordre, de la Mesure, de la Tempérance, de la Beauté, de l’Ordonnancement glorieux du Christianisme, le venin de ces licteurs de basses œuvres.
Un être se donnant grand maître de cette assemblée, injectait maintenant sa bassesse, désignant à la vindicte la Chrétienté, les trônes, les gouvernements, la famille, dans une telle virulence que l’on ne pouvait qu’être inquiet sur son état mental, l’hystérie étant sa marque, la folie son linceul. Accompagné en cela par une tribu qui se nommait Illuminés aux noms Romains et Grecs trahis, il déclamait sa parole de pestilence avec un je-ne-sais-quoi dans l’œil qui me fit penser qu’il jouissait de ses propos, comme d’ailleurs l’Assemblée qui maintenant se pressait pour écouter ses cris d’orfraie.
La lie de la société était là, dans son abandon, ses maximes, ses inepties, étalant à l’infini l’incohérence de son langage, un langage d’être imparfait ne voyant l’Humain que comme un compte d’apothicaire qui devait être régulé de son vivant, autorisé, jusqu’à sa mort enseignée, par le poison ou bien l’épée. Et pire encore il me fallut écouter ce décret de mort envers deux Rois, dont le Roi de France, qui devait être averti de cette ignominie.
Les paraboles de ce convent furent l’inexistence et l’acclamation de la mort, une foule en liesse devant l’usure, une foule en liesse devant l’abomination se croyant dominance et qui deviendrait dominance par la réduction au point létal de l’innocence de la qualité d’être Humain, de son Identité, de sa Nation, pour faire luire à l’horizon l’indifférencié, l’inutilité, le métissage, le genre, spoliant ainsi la divinité de sa création, spoliant ainsi la nature et l’exigence de la réalité pour se fondre dans une virtualité sans fin annonçant la fin de l’Humanité en sa multiplicité.
Y croire, il fallait le voir, ici des hyènes affamées, là des gitons déchaînés, là toute cette tribu d’aristocrates infâmes, liés par leurs dettes à cette infamie, une lie, comme je l’ai dit plus haut qui ne pourrait se soupçonner si nos espions, bien placés, au cœur même de cette tentative d’annihilation de l’Humain ne nous avaient prévenus de son existence.
Ce fumier se réjouissait, y allant de ses litanies, qui de la Liberté tronquée, qui de l’Égalité réservée aux élites, qui de la fraternité réservée aux frères de cette meute assoiffée de sang. Car cela était son principe, principe de vivipare habitude et rectitude que le feu de Dieu dans sa puissance avait frappée afin de la rendre à l’humilité. Ici nulle humilité, bien au contraire, jusqu’à l’accroire permissif de voir la tribu devenir maître de ce monde, si tant détenant l’or et ses rivages, la presse et ses organes, et par les dettes couronnant son principe de domination.
Voici donc cet essaim qu’il me fut donné à voir, un essaim de guêpes criminelles qui allait déverser son venin sur toute la Terre, en commençant par détruire la Nation la plus importante de cette époque, la France, cette France qu’il fallait terrasser, voyant les ovations de l’anglais comme de l’allemand, déjà asservi aux buboniques errances de cette plaie. Asservissement se voyant si bien dans les sourires idiots de la race de l’or s’entretenant en secret avec les uns les autres sans secrets de leurs miasmes, secrets de polichinelle, que ses écritures avaient depuis longtemps démasqué, prévoyant la mise à bas de toutes les étoffes de la terre pour les remplacer par leur prétendue élection de Dieu. Contestable prouesse dont les temps démontreraient l’inanité, ravaleraient à la simple défroque.
Le brouhaha des voix était tel que l’on ne s’entendait plus et ne percevait plus l’initié idolâtre qui épanchait son verbe, un verbe sans lustre d’ailleurs, pérorant les mêmes barbarismes, les mêmes mégalomanies houleuses semblant si bien correspondre à ce tapis de demeurés, d’oubliés de Dieu, répandant leur haine sur tout ce qui n’était pas eux et ne serait jamais eux, il ne faut pas en douter, quoi qu’il arrive. Le convent allait fermer ses portes et ses barbares en cohue maintenant se pressaient vers les auberges, d’autres vers les bordels et certains vers les échoppes, criant à tue-tête, c’est l’heure des agapes, venez mes frères ! Mot d’ordre suivi par les bassets poursuivant leurs litanies, les uns demandant de l’or, les autres quémandant des remises d’intérêts, ceux-ci se donnant des lettres de change, ceux-là, dans une liesse acharnée tâtant leurs rubis, leurs bourses et leurs habits brodés, à l’image de l’aristocrate grandeur, qu’ils n’égalaient, pas plus un singe n’égale l’être humain en habits.
La subversion était à l’œuvre, et ce nid de vipères se croyait à l’abri des regards de l’Ordre, ce qui n’était pas le cas. Il fallait lentement les laisser agir, les laisser-aller à leurs faites qui seraient leur chute, ce n’était là qu’une question de temps, les infiltrer, les insinuer au plus haut niveau quitte à détenir leur pouvoir, jouant même de leurs religions dans leurs religions, dans les mêmes états d’esprits qu’ils étaient, fanges de l’hypocrisie, du meurtre, de l’indécence, de la violence, du mensonge, de la propagande, toutes fosses de l’ineptie qui le jour viendrait leur seraient rendues à souhaits, les voyants dans leur turpitude implorer un pardon qui ne viendrait pas, tant leurs crimes seraient nombreux, tant l’infamie et les traîtrises seraient leurs sorts, mais cela est une autre histoire.
Ils se croyaient bien à l’abri dans leurs gargotes où ils faisandaient l’or et ses rubis, la billetterie de la folie, jouissant de la perdition, qui les enviait. Leurs plans par le plan reconnu de leurs délires viendraient à terme, sous l’impassibilité des veilleurs qui a l’instant précis de leur accroire en Pouvoir, viendraient détruire à jamais leur souci d’immolation, montrant à ce monde la pourriture de leurs agissements, la forfaiture de leurs engagements, la violence de leurs atermoiements, le venin de leurs pustules grotesques charriant tous les malheurs du monde, l’avarice, l’usure, la domestication, le déshonneur, la flagornerie, le mensonge, le génocide des Peuples, toutes déités de leur approbation qui les renverraient devant le tribunal de l’Humanité.
Cette Humanité qu’ils auraient voulu réduire au genre, au métissage, à la chose qui leur aurait permis d’en profiter jusqu’à la mort, cette chose qui se présentera devant eux et dans son rayonnement Humain les condamnera à jamais. Ceci n’est qu’une question de temps, le temps n’étant rien par rapport à leur petit manège, par rapport à leurs petites manœuvres, par rapport à ce lambeau qu’ils emporteront au tombeau. Ceci est inévitable et dans l’ordre des choses, dans l’ordre de la Voie qui ne peut s’accomplir en ce périple d’immondices, en ce périple de galvaudage, en ce périple d’abstractions, en ce périple décrété par la mort.
Car la mort est le visage de cette subversion, la mort dans tous ses états et toute sa domination, et se dressera devant elle la Vie pour la combattre et la réduire définitivement à l’oubli, la Vie ruisselant en chacun portant le flambeau de la Liberté, non la Liberté d’être esclave de l’usure, mais la Liberté de vivre et de s’épanouir. Ces réflexions me venaient en sortant de ce tombeau, terreau de l’inconscience et de la déperdition de la Vie, où la hideur était demeure. Mon équipage déjà partait vers d’autres sources noircies par ces obédiences tragiques qu’il me fallait correspondre pour les dissoudre, ce jour, demain, le temps n’a pas d’importance, l’important est de savoir qu’il vient, irrévocablement afin de détruire tout ce qui nuit à la Vie…
© Vincent Thierry