De la manipulation

De la manipulation

 

A vous de juger sur trois articles de fonds qui vous permettront d’y voir un peu plus clair.

 

Le Grand Orient d’Obama par Manlio Dinucci

Internationalnews

20 juillet 2012

RÉSEAU VOLTAIRE ROME (ITALIE) 20 JUILLET 2012

ITALIANO  ENGLISH

 

Tout en tenant un discours lénifiant sur la défense des droits de l’homme et la promotion de la démocratie, l’administration Obama a étendu sa zone d’intervention dans laquelle elle viole les droits de l’homme et bafoue les aspirations démocratiques des peuples.

Pendant 236 années les USA ont défendu partout la démocratie : c’est ce qu’a assuré Hillary Clinton au Caire [1]. Il convient donc d’effacer de l’Histoire les plus de 160 interventions militaires à l’étranger effectuées par l’impérialisme étasunien jusqu’aux années 40 ; les guerres de la Guerre froide en Corée, Vietnam, Laos, Cambodge, Liban ; les coups d’État orchestrés par la CIA au Guatemala, Indonésie, Brésil, Chili, Argentine ; les guerres de l’après-Guerre froide en Irak, Somalie, Yougoslavie, Afghanistan.

Le même engagement, garantit la Clinton, est porté par l’administration Obama. En effet, de la stratégie du Grand Moyen-Orient (comprenant Afrique du Nord et Asie centrale), lancée par le républicain Bush, le démocrate (et Prix Nobel de la paix) Obama est passé à la stratégie du Grand Orient, qui cible toute la région Asie/Pacifique en défi ouvert à la Chine et à la Russie.

Le premier pas a été la guerre contre la Libye, avec laquelle (comme le fit auparavant Bush avec la Yougoslavie) un État entier a été démoli pour mettre au pouvoir des gouvernants fidèles à Washington. On est ainsi arrivé aux « élections libres » dans la « Libye libre », gagnées par le « libéral » Mahmoud Jibril, dont le succès est attribué à la volonté populaire. On ignore que les USA et d’autres puissances occidentales ont dépensé des millions de dollars en Libye, pour s’assurer le soutien d’organisations et secteurs tribaux.

On ignore que Jibril est l’homme de confiance de Washington : économiste formé aux USA, chargé de promouvoir les libéralisations dans le monde arabe, il fut mis en 2007 en Libye à la tête de l’Office gouvernemental pour le développement économique, relié aux multinationales étasuniennes et britanniques. Dans cet habit, Jibril avertit Washington que le plan pour privatiser l’économie libyenne et former une nouvelle classe dirigeante pro-occidentale avait été bloqué par Kadhafi, et que la concurrence chinoise et russe se développait.

La victoire de Jibril était déjà programmée. Le 30 mars 2011 (dix jours après le début de la guerre), le New York Times écrivait à partir d’informations gouvernementales : « Si l’intervention américaine (étasunienne) et occidentale renversait Mouammar Kadhafi, Mahmoud Jibril pourrait être le leader de la Libye ».

La guerre contre la Libye est le modèle que les USA adoptent pour tenter de désagréger d’autres États, parmi lesquels la Syrie et l’Iran, qui font obstacle à leur avancée vers l’est.

Comme de nombreux pays sont réticents à héberger des bases militaires étasuniennes, le Pentagone est en train de déployer dans des eaux internationales, partant du Golfe et faisant route vers l’est, des navires appropriés pouvant servir de bases flottantes pour les forces spéciales.

D’autres bases aériennes et navales sont installées ou potentialisées en Thaïlande, aux Philippines, à Singapour, en Australie et autres pays. À Singapour est arrivé le premier « littoral combat ship », un nouveau navire de guerre qui peut s’approcher de la côte pour attaquer en profondeur. La Marine US en déploiera plus de 50 dans le Pacifique.

Dans l’offensive diplomatique, pour créer des fractures entre la Chine et ses voisins, la Clinton a effectué une « visite historique » au Laos. Promettant 9 millions de dollars pour le déminage, elle s’est faite photographier avec un jeune homme mutilé : une des nombreuses victimes des munitions non-explosées, environ 30 % des 2 millions de tonnes de bombes larguées par les USA sur le Laos de 1964 à 1973. Pour défendre la démocratie, naturellement.

Manlio Dinucci

Traduction 
Marie-Ange Patrizio

Source 
Il Manifesto (Italie)

 

[1] « Remarks With Egyptian Foreign Minister Amr », par Hillary Clinton, 14 juillet 2012.

 

http://www.internationalnews.fr/article-le-grand-orient-d-obama-par-manlio-dinucci-108351937.html

 

Charlie Skelton - The Guardian (UK)

 

Les médias ont été trop passifs au sujet des sources de l’opposition syrienne, sans s’intéresser à leur nature et à leurs affiliations politiques. Il est temps d’y regarder de plus près…

 

16 juillet 2012

 

C’est un cauchemar qui se déroule en Syrie, dans les maisons d’al-Heffa et dans les rues de Houla. Et nous savons tous comment l’histoire va finir : avec des milliers de soldats et de civils tués, des villes et des familles détruites, et le président Assad battu à mort dans un fossé.

 

C’est l’histoire de la guerre en Syrie, mais une autre histoire doit être dite. Une histoire moins sanglante, mais néanmoins importante. C’est une histoire des faiseurs de contes : les portes paroles, les « spécialistes de la Syrie », les « militants démocrates. » Les faiseurs de déclarations. Les gens qui « exhortent, » et « avertissent »et « appellent à l’action. »

 

C’est une histoire sur les membres les plus cités de l’opposition syrienne et leur connexion au business anglo-américain de fabrication d’oppositions. Les médias d’information grand public ont été, pour l’essentiel, remarquablement peu regardants au sujet des sources syriennes : en les présentant simplement comme « portes parole officiels » ou « militants pour la démocratie » sans, en général, examiner leurs déclarations, leurs trajectoires ou leurs affiliations politiques.

 

Il est important de le souligner : enquêter sur la trajectoire d’un porte-parole Syrien ne revient pas à mettre en doute la sincérité de son opposition à Assad. Mais une passion haineuse contre le régime Assad n’est en rien une garantie d’indépendance. En fait, in certain nombre de personnalités importantes du mouvement syrien d’opposition sont des exilés de longue date qui étaient subventionnés par le gouvernement US pour affaiblir le gouvernement Assad bien avant le déclenchement du Printemps arabe.

 

Même si la déposition du président Assad par la force n’a pas encore été ouvertement affichée par le gouvernement des Etats Unis, ces portes parole plaident ouvertement pour une intervention militaire en Syrie et sont de ce fait des alliés naturels pour les néoconservateurs US bien connus qui avaient soutenu l’invasion de l’Irak par Bush et font maintenant pression sur l’administration Obama pour qu’elle intervienne. Et comme nous le verrons, plusieurs de ces portes parole ont trouvé un soutien auprès de ceux qui, des deux côtés de l’Atlantique, sont en faveur d’ une intervention militaire, et dans certains cas, ils ont développé d’anciennes et lucratives relations avec eux.

 

« Le temps est compté » [Le sable s’écoule dans le sablier] a déclaré Hillary Clinton dimanche. Il est donc grand temps, au moment où les combats en Syrie s’intensifient, et où des bateaux de guerre russes font route vers Tartous, de regarder de plus près ceux qui parlent au nom du peuple syrien.

 

Le Conseil National Syrien

 

Les portes-parole d’opposition les plus cités sont les représentants officiels du Conseil National Syrien (CNS). Le CNS n’est pas la seule organisation d’opposition – mais il est généralement considéré comme « la principale coalition d’opposition » (BBC). Le Washington Times le décrit comme « une organisation qui coordonne des factions rivales basées hors de Syrie. » Le CNS est certainement l’organisation d’opposition qui a les relations les plus étroites avec les puissances occidentales et qui a appelé à une intervention étrangère dès les premières phases du soulèvement. En février de cette année, à l’ouverture du sommet des Amis de la Syrie en Tunisie, William Hague [ministre britannique des affaires étrangères, NdT] avait déclaré : « Je rencontrerai les dirigeants du Conseil national Syrien d’ici quelques minutes… Nous, ainsi que d’autres nations, les traiterons et les reconnaîtrons en tant que représentants légitimes du peuple syrien. »

Le plus haut porte-parole officiel du SNC est l’universitaire syrienne établie à Paris, Bassma Kodmani.

 

Bassma Kodmani §

 

Kodmani est membre du bureau exécutif et chargée des affaires étrangères au Conseil National Syrien. Kodmani est proche du centre de la structure de pouvoir du CNS, et elle est un des porte-paroles du CNS les plus actifs. « Aucun dialogue n’est possible avec le régime en place. Nous ne pouvons discuter que de la manière d’aller vers un système politique différent, » a-t-elle déclaré cette semaine. On la retrouve, citée par l’AFP : « L’étape suivante requiert une résolution sous le chapitre VII [de la charte de l’ONU] qui autorise l’usage de tous les moyens légitimes, de moyens coercitifs, d’un embargo sur les armes ainsi que l’usage de la force pour obliger le régime à se conformer » [à la résolution].

 

Cette déclaration a été titrée de la manière suivante : « Les Syriens appellent à une force armée de maintien de la paix » (Herald Sun, Australie). Quand il est fait appel à une action militaire internationale de grande ampleur, il semble tout simplement raisonnable de demander : qui exactement fait cet appel ? Nous pouvons dire simplement, « un porte-parole officiel du SNC, » ou nous pouvons regarder d’un peu plus près.

 

Cette année, c’était le deuxième Bilderberg pour Kodmani. A la conférence de 2008, Kodmani était inscrite en tant que française ; en 2012 sa francité avait disparu et elle était inscrite simplement comme « internationale » - sa patrie était devenue le monde des relations internationales.

 

Quelques années en arrière, Kodmani travaillait pour la Ford Foundation au Caire, où elle était directrice de son programme de gouvernance et de coopération internationale. La Ford Foundation est une vaste organisation dont le siège est à New York et Kodmani avait déjà un rang assez haut placé. Mais elle était sur le point de monter d’une division.

 

Vers cette époque, février 2005, les relations syro-étatsuniennes s’étaient gravement détériorées, et le président Bush avait rappelé son ambassadeur à Damas. De nombreux projets d’opposition datent de cette période. « L’argent US pour des personnalités de l’opposition syrienne a commencé à affluersous le président George W. Bush après qu’il a effectivement gelé les relations politiques avec Damas en 2005, » explique le Washington Post.

 

En septembre 2005, Kodmani a été nommée directrice exécutive de l’Arab Reform Initiative (ARI)- un programme de recherche initié par une puissante organisation de lobbying, le Council on Foreign Relations (CFR).

 

Le CFR est un think tank d’élite en matière de politique étrangère, l’Arab Reform Initiative est présenté sur son site web comme un « projet du CFR. » Plus précisément, l’ARI a été lancée par une organisation interne au CFR appelée le US/Middle East Project" – un groupe de diplomates de haut niveau, de financiers et d’officiels du renseignement, dont l’objectif affiché est d’entreprendre une « analyse politique » régionale de sorte « à prévenir les conflits et à promouvoir la stabilité. » L’ US/Middle East Project poursuit ces objectifs sous la supervision d’un conseil international présidé par le général en retraite Brent Snowcroft.

Brent Snowcroft (président émérite) est un ancien conseiller pour la sécurité nationale du président des Etats Unis – il avait succédé dans ce rôle à Henry Kissinger. A côté de Snowcroft dans le bureau international, nous trouvons son collègue en géostratégie Zbigniew Brzezinski qui lui avait succédé comme conseiller pour la sécurité nationale, et Peter Sutherland, le PDG de Goldman Sachs International. (..) 2005, le CFR avait assigné le « contrôle financier » du projet au Centre for European Reform (CER). C’est là que les Britanniques entrent en scène.

 

Le CER est supervisé par Lord Kerr ; le vice président de Royal Dutch Shell. Kerr est un ancien chef du service diplomatique et est conseiller principal à Chatham House (un think tank qui réunit les meilleurs cerveaux de l’establishment diplomatique britannique).

 

(..) Dans la liste de ses membres, vous trouverez le nom : « Bassma Kodmani (France/Syrie) – Directrice Exécutive, Arab Reform Initiative. »

 

Autre nom sur la liste : George Soros – le financier dont l’organisation à but non lucratif ‘Open Society Foundations » est une des principales sources de financement de l’ECFR. A ce niveau, les mondes de la banque, de la diplomatie, de l’industrie, du renseignement et les divers fondations et instituts de stratégie politique se retrouvent tous ensemble et, là, au milieu de tout ça, se trouve Kodmani.

 

Ce qu’il faut relever, c’est que Kodmani n’est pas une quelconque « militante pro-démocratie » qui s’est retrouvée par hasard devant un microphone. Elle dispose de références diplomatiques impeccables : elle a le statut de directrice de recherche à l’Académie Diplomatique Internationale – « une institution indépendante et neutre qui a pour vocation de promouvoir une diplomatie moderne ». L’Académie est présidée par Claude Cousseran, un ancien chef de la DGSE – le service de renseignements extérieurs français.

 

L’image qui se forme est celle de Kodmani comme fidèle lieutenant del’industrie anglo-américaine de promotion de la démocratie. Sa « province d’origine » (d’après le site internet du CNS) est Damas, mais elle a des relations professionnelles étroites et anciennes avec précisément ces mêmes puissances qu’elle appelle à intervenir en Syrie.

 

Et nombre de ses collègues porte-paroles ont également de bonnes relations.

 

Radwan Ziadeh

 

Un autre représentant du SNC souvent cité est Radwan Ziadeh – directeur des relations extérieures du Conseil National Syrien. Ziadeh a un CV impressionnant : senior fellow d’un think tank de Washington financé par le gouvernement fédéral, l’US Institute of Peace (le conseil d’administration de l’USIP est plein d’anciens du Département de la Défense et du National Security Council ; son président est Richard Solomon, ancien conseiller de Kissinger au National Security Council).

 

En février de cette année, Ziadeh s’est associé à un groupe de faucons de l’élite de Washington pour signer une lettre appelant Obama à intervenir en Syrie (..)

 

Ausama Monajed

 

Avec Kodmani et Ziadeh, Ausama (ou parfois Osama) Monajed est un des plus importants porte-paroles du CNS. Il y en a d’autres, bien sûr – le CNS est une structure énorme qui comprend les Frères Musulmans. Le spectre de l’opposition à Assad est très large, mais ce sont là quelques voix essentielles(..)

 

 

Mais il est hors de doute que la principale organisation d’opposition est le CNS et on constate que ce sont souvent Kodmani, Ziadeh et Monajed qui le représentent. Monajed apparaît souvent comme commentateur sur les chaînes télévisées d’informations. On le voit ici s’exprimant depuis son bureau à Washington. Monajed n’édulcore pas son message : « Nous voyons tous les jours à la télévision des civils assassinés et des enfants assassinés et tués, et des femmes violées »

 

Dans le même temps, sur Aljazeera, Monajed parle de « ce qui se passe vraiment, en réalité, sur le terrain, » des « miliciens d’Assad » qui « viennent et violent les femmes, tuent les enfants et les personnes âgées. » Monajed est devenu, depuis seulement quelques jours, blogueur sur le Huffington Post UK, où il explique en long et en large ; « Pourquoi le monde doit intervenir en Syrie » - appelant à une « assistance militaire directe » et à une « aide militaire étrangère. » Une fois de plus, la bonne question pourrait être : qui est ce porte-parole qui appelle à une intervention militaire ?

 

Monajed est membre du CNS où il est conseiller du président et il est, selon sa biographie au CNS, « le fondateur et directeur de Barada Television, » une chaîne satellitaire basée à Vauxhall, Londres sud. En 2008, quelques mois après avoir assisté à la conférence Syria In-Transition, Monajed était reparti pour Washington, invité à dîner avec George W. Bush avec d’autres dissidents bien en cour (on peut voit Monajed sur la photo souvenir, le troisième à partir de la droite, cravate rouge, non loin de Condoleeza Rice –à l’opposé de Garry Kasparov).

 

A cette époque, en 2008, le Département d’Etat US connaissait Monajed en tant que « directeur des relations publiques pour le Mouvement pour la Justice et le Développement (MJD) qui dirige la lutte pour un changement démocratique et pacifique en Syrie. »

 

Examinons de plus près le MJD. L’an dernier, le Washington Post a sélectionné une information de Wikileaks qui a publié des quantités de communications diplomatiques piratées. Ces communications montrent qu’un important flux financier va du Département d’Etat US au Mouvement pour la Justice et le Développement dont le siège se trouve en Grande Bretagne. Selon l’article du Washington Post : « Barada TV est étroitement affiliée au Mouvement pour la Justice et le Développement, un réseau d’exilés Syriens établi à Londres. Les câbles diplomatiques américains classifiés montrent que le Département d’Etat a donné pas moins de 6 millions de dollars à cette organisation depuis 2006 pour qu’elle fasse fonctionner la chaîne satellitaire et pour financer d’autres activités à l’intérieur de la Syrie. »

 

Un porte-parole du Département d’Etat avait réagi à cet article en déclarant : « Essayer de promouvoir une transformation vers un processus plus démocratique dans cette société ne porte pas nécessairement atteinte au gouvernement en place ». » Et ils ont raison, « pas nécessairement. »

 

Questionné au sujet de l’argent du Département d’Etat, Monajed dit lui-même « ne pas pouvoir confirmer » un financement du Département d’Etat US pour Barada TV, mais déclare : « Je n’ai personnellement pas reçu un centime. » Malik al -Abdeh, tout récemment encore chef de la rédaction à Barada TV insiste : « Nous n’avons pas eu de liens directs avec le Département d’ Etat US. » La signification de cette phrase tourne autour du mot « directs ». Il convient de noter que Malik al -Abdeh, se trouve aussi être un des fondateurs du Mouvement pour la Justice et le Développement (destinataire de 6 millions de dollars du Département d’Etat selon le câble rendu public). Et il est le frère du président de la chaîne, Anas Al-Abdah. Il est aussi copropriétaire de la marque déposée du MJD : ce que Malik al Abdeh reconnaît, c’est que Barada TV reçoit une bonne part de ses financements d’une fondation américaine : le Democracy Council. Un des co-sponsors (avec le MJD) de la mini-conférence Syria In-Transition. Donc, ce que nous avons en 2008, lors de cette même réunion, ce sont précisément les dirigeants de des organisations identifiées dans les câbles Wikileaks comme étant le canal (le Democracy Council) et le bénéficiaire (le MJD) de grosses sommes d’argent du Département d’Etat.

 

Le Democracy Council (un pourvoyeur de subventions basé aux Etats Unis) cite le Département d’Etat comme étant une de ses sources de financement. Il travaille ainsi : le Democracy Council sert d’intermédiaire pour gérer des subventions en tant qu’intermédiaire entre la "Middle East Partnership Initiative" du Département d’Etat et des « partenaires locaux » (comme Barada TV). Comme l’explique le Washington Post :

« Plusieurs câbles diplomatiques émanant de l’ambassade à Damas révèlent que les exilés Syriens reçoivent de l’argent d’un programme du Département d’Etat appelé la Middle East Partnership Initiative. Selon ces câbles, le Département d’Etat a fait transiter l’argent à l’organisation en exil via le Democracy Council, une fondation dont le siège se trouve à Los Angeles. »

 

Le même article attire l’attention sur un câble de 2009 émis par l’ambassade US en Syrie qui indique que le Democracy Council a reçu 6,3 millions de dollars du Département d’Etat pour réaliser un programme concernant la Syrie, la "Civil Society Strengthening Initiative". Le câble la décrit comme « un discret effort de collaboration entre le Democracy Council et des partenaires locaux » dans le but de produire, entre autres choses, « divers concepts de diffusion [des idées]. » Selon le Washington Post : « D’autres câbles indiquent clairement qu’un de ces concepts était Barada TV. »

 

Il y a encore quelques mois, la Middle East Partnership Initiative (MEPI) du Département d’Etat était supervisée par Tamara Cofman Wittes (elle est maintenant à la Brookings Institution – un thinktank influent de Washington). Selon elle, la MEPI a « créé une ‘image’ positive des efforts des USA pour promouvoir la démocratie. » Quand elle travaillait sur ce dossier, elle avait déclaré : « Il y a de nombreuses organisations en Syrie et dans d’autres pays qui veulent des changements dans leurs gouvernements… C’est un agenda auquel nous croyons et nous allons le soutenir. » Et par soutien, elle veut dire financier.

 

L’argent

 

Ce n’est pas nouveau. Revenez un moment au début 2006, et vous avez une annonce par le département d’Etat d’une nouvelle « opportunité desubventionnement » appelée le « Syria Democracy Program. » Avec une offre de subventions d’un montant de « 5 millions de dollars sur l’année fiscale fédérale 2006. » Le but de ces subventions ? « Accélérer le travail des réformateurs en Syrie. »

 

En ce moment, l’argent afflue encore plus vite que jamais (Cf le 18.7.12, attentat du "garde du corps" de Bcahar-el-Assad, grassement payé, note de CD). Au début juin 2012, le Syrian Business Forum a été lancé à Doha par des dirigeants de l’opposition, dont Wael Merza (secrétaire général du CNS). « Ce fonds a été établi pour soutenir toutes les composantes de la révolution en Syrie, » avait déclaré Merza. Le niveau de ce fonds ? Quelque 300 millions de dollars. La provenance de l’argent n’est pas claire du tout, quoique Merza « a fait allusion à un puissant soutien financier des Etats arabes du Golfe pour le nouveau fonds » (al Jazeera). A son lancement, Merza avait dit que quelque 150 millions de dollars avaient déjà été dépensés, en partie pour l’Armée Syrienne Libre (ASL).

 

L’organisation d’hommes d’affaires Syriens de Merza était présente à une conférence du Forum Economique Mondial intitulée « Plateforme pour la coopération internationale » qui s’est tenue à Istanbul en novembre 2011. Tout cela s’inscrit dans le processus par lequel le SNC a grandi en réputation, pour devenir selon les propres termes de William Hague, « un représentant légitime du peuple syrien » et être capable de gérer ouvertement ces sommes énormes.

 

Construire la légitimité – de l’opposition, de sa représentation, de l’intervention – est l’essentiel de bataille propagandiste.

 

Dans une lettre ouverte publiée en février de cette année par USA Today, l’ambassadeur Dennis Ross déclarait : « Il est temps de rehausser le statut du Conseil national Syrien. » Ce qu’il voulait, urgemment, était « la création d’une aura d’inévitabilité du CNS comme alternative à Assad. » L’aura d’inévitabilité. Gagner la bataille à l’avance.

 

Un combattant essentiel dans cette bataille pour les esprits et les cœurs est le journaliste Américain et blogueur pour le Daily Telegraph, Michael Weiss.

 

Michael Weiss

 

Un des experts de la Syrie les plus cités dans les médias occidentaux – et un enthousiaste d’une intervention occidentale – Michael Weiss fait écho à l’ambassadeur Ross quand il dit : Une intervention militaire en Syrie n’est pas tant une question de préférence que d’inévitabilité. »

 

Certains écrits interventionnistes de Weiss peuvent être trouvés sur le site web beyrouthin pro-Washington appelé ‘NOW Lebanon’ – dont la section ‘NOW Syria’ est une source importante d’actualités syriennes. NOW Lebanon a été créé en 2007 par Eli Khoury, un cadre de Saatchi & Saatchi. Khoury est présenté dans l’industrie publicitaire comme « un spécialiste de la communication stratégique, spécialisé dans le développement de l’image de marque des entreprises et des gouvernements. »

 

En mai dernier, Weiss avait déclaré à NOW Lebanon que grâce à la fourniture d’armes aux rebelles Syriens, « nous avons déjà commencé à voir quelques résultats. » Il avait montré une approbation semblable pour les développements militaires quelques mois auparavant dans un article pour le New Republic : « Au cours des dernières semaines, l’Armée Syrienne Libre et d’autres unités rebelles indépendantesont fait de gros progrès – à la suite de quoi, comme tout blogueur peut le faire, il avait présenté son « Plan d’action pour une intervention militaire en Syrie. »

 

Mais Weiss n’est pas seulement un blogueur. Il est aussi le directeur de la communication et des relations publiques de la Henry Jackson Society, un thinktank de politique étrangère ultra-ultra-belliciste.

 

Parmi les parrains de la Henry Jackson Society à l’international, figurent : James "ex-CIA boss" Woolsey (..)

 

La Henry Jackson Society est intransigeante sur sa « stratégie avancée » pour la démocratie. Et Weiss est chargé du message. La Henry Jackson Society est fière de la grande influence de son chef des relations publiques : « Il estl’auteur de l’influent rapport « Intervention en Syrie ? Une évaluation de la légalité, de la logistique et des risques, » qui a été repris et approuvé par le Conseil national Syrien. »

 

Le rapport original de Weiss a été rebaptisé "Safe Area for Syria" – et a fini sur le site web officiel syriancouncil.org, comme pièce de la littérature stratégique de leur bureau militaire. La reprise du rapport de la Hery Jackson Society a été orchestrée par le fondateur et directeur exécutif du Strategic Research and Communication Centre (SRCC) – un certain Ausama Monajed.

 

Donc, le fondateur de Barada TV, Ausama Monajed, a édité le rapport de Weiss, l’a publié via sa propre organisation (le SRCC) et l’a transmis au Conseil national Syrien avac le soutien de la Henry Jackson Society.

 

La relation ne pouvait pas être plus étroite. Monajed en vient même à traiter des demandes pour des « interviews de la presse avec Michael Weiss. » Weiss n’est pas le seul stratégiste à avoir esquissé une feuille de route pour cette guerre (de nombreux thinktanks y ont réfléchi, de nombreux faucons en ont parlé), mais certains des aspects les plus saillants sont le produit de sa réflexion.

 

L’Observatoire Syrien pour les Droits de l’Homme

 

La justification pour « l’inévitable » intervention militaire est la sauvagerie du régime du président Assad : les atrocités, les bombardements, les violations des droits de l’homme. L’information est cruciale ici, et une source domine toutes les autres quant à la fourniture d’informations sur la Syrie. Elle est citée à chaque fois : « Le directeur de l’Observatoire Syrien pour les Droits de l’Homme (OSDH) a déclaré à la Voice Of America que les combats et les bombardements avaient tué au moins 12 personnes dans la province de Homs. »

 

L’OSDH est communément utilisé comme unique source pour d’informations et de bilans statistiques. Cette semaine, par exemple, l’AFP a publié cette dépêche : « Les forces syriennes ont bombardé les provinces d’Alep et de Deir Ezzor et au moins 35 personnes ont été tuées dimanche dans tout le pays, dont 17 civils, a annoncé un organisme d’observation. » Différentes atrocités ainsi que des chiffres de pertes sont énumérés, tous en provenance d’une seule source : « Rami Abdel Rahman, le directeur de l’Observatoire a déclaré par téléphone à l’AFP. »

 

Des statistiques plus horribles les unes que les autres émanent en nombre de « l’Observatoire Syrien pour les Droits de l’Homme » (AP). Il est difficile de trouver une information de la presse sur la Syrie qui ne le cite pas. Mais qui sont-ils à l’OSDH ? « Ils », c’est Rami Abdulrahman (ou Rami Abdel Rahman), qui réside à Coventry.

 

Rami Abdullrahman chez lui à Coventry

 

Selon une dépêche Reuters de décembre de l’an dernier : « Quand il ne répond pas aux appels téléphoniques de la presse internationale, Abdulrahman n’est qu’à quelques minutes, plus bas dans la rue, dans son magasin de vêtements qu’il gère avec sa femme. »

Quand le blog Middle East live du Guardian avait cité « Rami Abdul-Rahman de l’ Observatoire Syrien pour les Droits de l’Homme, » il avait aussi proposé un lien vers un article sceptique du Modern Tokyo Times, un article qui invitait les organes d’information à être un peu « plus objectifs quant à leurs sources » quand ils citent « cette soi-disant entité, » qu’est l’OSDH.

 

Ce nom, « Observatoire Syrien pour les Droits de l’Homme », sonne si respectable, si inattaquable, si objectif. Et pourtant, quand Abdulrahman et son « ONG basée en Grande Bretagne » (AFP/NOW Lebanon) sont la seule source pour de nombreuses informations sur un sujet aussi important, il pourrait sembler raisonnable de soumettre cet organisme à un examen un peu plus approfondi que ce qui a été fait jusqu’à présent.

 

Cet Observatoire n’est en aucun cas la source syrienne d’informations à qui on peut faire confiance aveuglément ou presque…

 

Hamza Fakher

 

La relation entre Ausama Monajed, le CNS, les faucons de la Henry Jackson Society et un média accepté sans condition peut s’observer dans le cas de Hamza Fakher. Le 1er janvier, Nick Cohen écrivait dans l’Observer : « Pour avoir un aperçu du niveau de la barbarie, écoutez Hamza Fakher, un militant pour la démocratie qui est une des sources les plus fiables sur les crimes que cache le blackout du régime sur l’information. »

 

Il poursuit en reprenant les horribles récits de Fakher de tortures et de massacres. Fakher parle à Cohen d’une nouvelle technique de torture dont il a entendu parler, la plaque brûlante : « imaginez toute la chair fondant jusqu’à l’os avant que le prisonnier tombe sur la plaque. » Le lendemain, Shamik Das, écrivant sur la « base de preuves » dans le blog progressiste Left Foot Forward, cite la même source : « Hamza Fakher, un militant pour la démocratie, décrit l’affligeante réalité… » - répète le compte rendu de Cohen sur les atrocités.

 

Alors, qui est exactement le « militant pour la démocratie » Hamza Fakher ?

 

Il se trouve que Fakher est le co-auteur de Revolution in Danger, un « briefing de le Henry Jackson Society » publié en février 2012. Il a co-rédigé ce document avec Michael Weis, le directeur de la communication de la Henry Jackson Society. Et quand il ne co-écrit pas des briefings de la Henry Jackson Society, Fakher est le directeur de la communication du Strategic Research and Communication Centre (SRCC) basé à Londres. Selon leur site web, « Il a rejoint le centre en 2011 et a été chargé de la stratégie et des produits de communication du centre. »

 

Comme vous vous en souvenz sans doute, le SRCC est dirigé par Ausama Monajed : « M. Monajed a fondé le centre en 2010. Il est largement cité et interviewé dans la presse et les médias internationaux. Il travaillait auparavant comme consultant en communication en Europe et aux Etats Unis et a été directeur de Barada Television… »

 

Monajed est le patron de Fakher.

 

Si ce n’était pas suffisant, pour la touche finale de Washington, on trouvera au conseil d’administration du Strategic Research and Communication Centre, Murhaf Jouejati, profeseur à la National Defence University, à Washington – « la première institution de formation militaire interarmes (JPME oint Professional Military Education) qui est « sous l’autorité de son président, le chef d’état-major inter armes. »

 

Si vous aviez envie d’aller faire un tour au "Strategic Research and Communication Centre" de Monajed, vous le trouverez à cette adresse : Strategic Research & Communication Centre, Office 36, 88-90 Hatton Garden, Holborn, London EC1N 8PN.

 

Office 36 à 88-90 Hatton Garden est aussi l’endroit où vous trouverez le siège londonien de The Fake Tan Company (..)  Et encore une autre centaine d’entreprises. C’est un bureau virtuel. Il y a d’ailleurs quelque chose d’étrangement approprié dans tout ça. Un « centre de communication » - qui n’a même pas de local – au nom pompeux mais sans substance concrète.

 

C’est la réalité de Hamza Fakher. Le 27 mai, Shamik Das de Left Foot Forward a cité à nouveau un récit d’atrocités relaté par Fakher qu’il présente cette fois comme « le récit d’un témoin oculaire » (ce que Cohen n’a jamais affirmé) et qui maintenant s’est cristallisé comme étant « le dossier du régime Assad. » (..)

 

 

Je ne veux pas dire que les récits d’atrocités sont forcément faux, maiscombien parmi ceux qui les prennent pour argent comptant s’intéressent à leurs origines ?

 

Et n’oublions pas, la déstabilisation qui a été entreprise dans le domaine de l’information et de l’opinion publique l’est encore plus sur le terrain. Nous savons déjà que (au minimum) « la CIA et le Département d’Etat… aident l’Armée Syrienne Libre de l’opposition à développer des routes logistiques pour acheminer des fournitures à l’intérieur de la Syrie et donnent une formation dans le domaine des [télé]communications. » (Comme la France de Fabius, note de C D)

 

Les soutes à bombes sont ouvertes. Les plans ont été préparés.

 

Ces choses étaient en préparation depuis longtemps. L’énorme énergie et la planification méticuleuse qui ont été investies dans ce changement de régime – c’est à vous couper le souffle. La force de persuasion et les entrées politiques des grandes fondations et des think tanks politiques sont considérables, mais l’examen des sources ne se contente pas de titres pompeux, de bourses de recherche et de « briefings de stratégie. » On doit demander : directeur exécutif de quoi exactement. Le fait d’avoir les mots« démocratie » ou « droits de l’homme » dans l’intitulé de votre job ne vaut pas dispense de ce contrôle.

 

Et si vous êtes un « responsable de la communication, » cela implique que vos paroles doivent être accueillies avec une prudence extrême. Weiss et Fakher, tous deux responsables de communication sont des professionnels des relations publiques. Lors de l’évènement de Chatham House en juin 2001, Monajed était inscrit en tant que « directeur de la communication de la National Initiative for Change » et il était directeur des relations publiques pour le Mouvement pour la Justice et le Développement (MJD). Le craéteuutr du site web d’informations NOW Lebanon, Eli Khoury, est un cadre publicitaire de Saatchi. Ces responsables de la communication travaillent dur pour créer ce que Tamara Witts appelait une [image de] « marque positive. »

 

Ils vendent l’idée d’une intervention militaire et d’un changement de régime, que la presse grand public est pressée d’acheter.

 

Beaucoup de « militants » et de porte-paroles de l’opposition syrienne sont étroitement liés (souvent financièrement) aux Etats Unis et à Londres : à ceux-là mêmes qui feraient l’intervention. Ce qui veut dire que les informations et les chiffres donnés par ces sources ne sont pas nécessairement de la pure information ; ce sont des arguments de vente dans une campagne de relations publiques.

 

Mais il n’est jamais trop tard pour poser des questions, pour examiner des sources. Poser des questions ne fait pas de vous un admirateur d’Assad ; c’est un argument spécieux. Cela vous rend seulement moins susceptible d’être induit en erreur par la propagande.

 

La bonne nouvelle, c’est qu’il nait un sceptique par minute.

 

Charlie Skelton - The Guardian (UK)

12 juillet 2012

 

Un prêtre syrien écrit à Hollande

 

Mercredi 18 juillet 2012 ⋅ 09:07 ⋅

 

« Je nourrissais le vague espoir de voir définitivement tournée, la politique de cirque de votre burlesque prédécesseur. À vous écouter, je me suis rapidement surpris à m’interroger sur le bienfondé de mon attente. Il m’a fallu vite déchanter. Je restais ébahi devant votre visage bon enfant, pendant que vous vous permettiez de prononcer des jugements péremptoires, sur tout et sur tous, sans la moindre nuance, ni hésitation.

Mais quand je vous ai entendu parler de la Syrie et de son président, j’ai bien cru entendre la voix même des Maîtres qui vous ont juché sur ce premier poste de France, dans l’unique but de mener à bien le projet de destruction de la Syrie, que votre prédécesseur a été incapable de conduire jusqu’au bout.

Pour une première à la Télévision, c’en était bien une ! Je vous attends de pied ferme, lors des tout proches désenchantements des français. Pour ma part, vieux connaisseur de la France et des français, je me suis surpris à me dire : quelle dégringolade, depuis le départ du Général de Gaulle !

Mr le Président, Avant de poursuivre, il est une coïncidence historique que je me dois de vous signaler, et que vous ignoriez sans aucun doute. Sinon vous auriez évité de vous laisser interviewer, un 29 Mai ! En effet, il est un autre 29 Mai, au cours duquel la France s’est misérablement déshonorée.

C’était en 1945. En ce jour même, la France «MANDATAIRE», s’est permis de bombarder le Parlement Syrien à Damas, pour, ensuite, laisser ses soldats noirs, assassiner les 29 gendarmes, en poste, dans ce haut-lieu de la démocratie. Le saviez-vous ?

Mr le Président, N’est-il pas temps, pour la France, et, donc, pour vous-même, de réfléchir pour de bon sur cette ignoble politique qui, depuis 1916, année des accords aussi secrets que honteux, appelés depuis «Accords Sykes-Picot», la conduit sur les ordres du Sionisme, à détruire la Syrie et le Monde Arabe ? N’y avait-il de clairvoyant et de noble, dans toute la France d’alors, que Mr Aristide Briand, ministre des Affaires étrangères, pour avoir donné à votre Consul Général à Beyrouth, Mr Georges Picot, en date du 2 Novembre 1915, en prévision de ces accords, cette consigne claire et perspicace : «Que la Syrie ne soit pas un pays étriqué… Il lui faut une large frontière, faisant d’elle une dépendance pouvant se suffire à elle-même» ?

Pour une Syrie «se suffisant à elle-même», et telle que l’avait, déjà, tracée, en 1910, une carte géographique émanant de ce même ministère des Affaires étrangères, vous devez savoir ce qu’il en fut, après qu’elle fût amputée, au Nord-Ouest de la Cilicie, au Nord-Est de la région de Mardine, dans ce qui est l’Irak actuel, de Mossoul, à l’Ouest du Liban, au Sud de la Jordanie et de la Palestine, pour être décapitée, en 1939, d’Antioche et du golfe d’Alexandrette, offerts en cadeaux à la Turquie !

[...]

Mr le Président, Il est aussi une question capitale, que je me dois, en tant que citoyen arabe de Syrie, de vous poser, ainsi qu’à tous les «leaders» occidentaux : «Pourquoi vous faut-il systématiquement assassiner les peuples arabes et musulmans ?»

Vous l’avez déjà fait en dressant, entre 1980-90, l’Irak contre l’Iran, cet Irak, dont le malheureux Saddam Houssein se faisait traiter de «Grand ami», tant par Donald Rumsfeld que par Jacques Chirac ! Ce fut aussitôt après, le guet-apens du Koweït, entraînant la guerre contre l’Irak, suivi d’un blocus de (13) ans, qui a causé à lui seul, d’après les rapports américains mêmes, la mort de 1.500.000 enfants irakiens ! Ce fut ensuite la chevaleresque «guerre contre le terrorisme»… en Afghanistan ! Aussitôt suivie d’une nouvelle guerre contre l’Irak.

Quant à l’immortelle épopée de l’OTAN, en Lybie, conduite par «le général-philosophe», Bernard Henri Lévy, elle vint, à nouveau, compléter ces horreurs, sous prétexte de protection des droits de l’homme ! Et voici que, depuis 15 mois, tout l’Occident s’acharne contre la Syrie, oubliant une infinité de problèmes très graves, à commencer par le Conflit israélo-arabe, qui menacent, réellement, la survie de l’humanité !

Or, toutes ces tragiques politiques occidentales, vous les pratiquez sans honte et sans vergogne, sous couvert de tous les mensonges, de toutes les duplicités, de toutes les lâchetés, de toutes les contorsions aux Lois et Conventions Internationales. Vous y avez en outre engagé ces Instances Internationales, que sont les Nations-Unies, le Conseil de Sécurité et le Conseil des droits de l’homme, alors qu’elles n’ont existé que pour régir le monde entier vers plus de justice et de paix !

Seriez-vous donc, en Occident, en train de nourrir l’espoir stupide de mettre fin de cette façon à l’Islam ? Vos savants et vos chercheurs ne vous ont-ils pas fait comprendre que vous ne faites que provoquer un Islam outrancier, que vous vous obstinez d’ailleurs à financer, à armer et à lâcher avec nombre de vos officiers, un peu partout dans les pays arabes, et surtout en Syrie ? Ne vous rendez-vous pas compte que ce faux Islam se retournera, tôt ou tard, contre vous, au coeur de vos capitales, villes et campagnes ?

Pour tout cela, laissez-moi vous rappeler, moi simple citoyen de Syrie, que cet Islam que vous armez et dressez contre le Monde Arabe, en général, et la Syrie, en particulier, n’a rien à voir avec le véritable Islam, celui-là même que la Syrie a connu, lors de la Conquête arabe, ainsi que l’Égypte et, enfin, l’Espagne. Faut-il vous rappeler que les historiens occidentaux, dont des historiens juifs, ont dû reconnaître que l’Islam conquérant s’est révélé être le plus tolérant des conquérants ?

Ou ne seriez-vous, leaders occidentaux, dans vos différents pays, repus d’opulence et de «grandeur», que les vils exécuteurs des projets sionistes, depuis ces fameux Accords Sykes-Picot, et l’ignominieuse «Promesse Balfour», jusqu’à ce jour, et pour longtemps, semble-t-il, toujours empressés d’apporter à Israël, tous les soutiens possibles, connus et secrets, à tous les niveaux, aussi bien politiques et diplomatiques, que militaires, financiers et médiatiques ?

Oui, pourquoi vous faut-il assassiner et détruire des peuples entiers, pour qu’ISRAËL, SEUL, puisse enfin vivre et survivre ? Est-ce de la sorte que vous cherchez à réparer votre terrible complexe de culpabilité vis-àvis des juifs, dû à un antisémitisme plus que millénaire et proprement occidental ? Vous faut-il le faire au prix de l’existence même de ces peuples arabes et musulmans, au milieu desquels les juifs avaient mené une vie quasi normale, faite de cordialité, voire, de riche collaboration?

Si mes interrogations vous paraissent exagérées ou outrancières, permettez-moi de vous prier de lire ce qu’ont écrit sur l’emprise du Sionisme aux États-Unis, des hommes comme John Kennedy et Jimmy Carter, et des chercheurs courageux et connus, comme Paul Findley, Robert Dole, David Duke, Edward Tivnan, John Meirsheimer, Stephen Walt, Franklin Lamb, et surtout Noam Chomsky.

Pour ce qui concerne l’emprise du Sionisme en Europe, je m’en tiens aujourd’hui à la France seule. Vu la responsabilité qui est la vôtre, vous est-il permis d’oublier ou d’ignorer ce qu’ont, si courageusement, écrit : Roger Garaudy, Emile Vlajki, Pierre Leconte, Régis Debray, et surtout les juifs Michel Warshawsky, Stéphane Hessel, Serge Grossvak et le Professeur André Noushi ?

Si par impossible, tous ces noms ne vous disaient rien, laissez-moi vous rappeler quelques noms si connus en Israël même, qu’il serait malhonnête de les ignorer et d’ignorer ce qu’ils ont osé dire depuis quarante, voire, cinquante ans, et certains bien avant la «création» d’Israël : Martin Buber, Albert Einstein, Yshayahou Leibowitz, Israël Shahak, Susan Nathan, Tanya Rheinhart.

Pour finir, laissez-moi vous rappeler un texte trop connu pour passer inaperçu. Il date du mois de février 1982. À lui seul, il constitue et condense l’implacable dictat sioniste, imposé depuis des dizaines d’années, à toute la politique occidentale. Il a paru dans la revue sioniste «KIVOUNIM», publiée à Jérusalem. Il s’agit d’un article intitulé « Stratégie d’Israël dans les années 1980″, et il porte la signature de Mr Oded Yinon. Je me contente d’en citer un seul paragraphe, reproduit (p.62) dans un livre récent, intitulé «Quand la Syrie s’éveillera…», paru, à Paris, chez Perrin, en 2011. Ses auteurs sont Richard Labévière et Talal El-Atrache. On y lit textuellement :

«La décomposition du Liban en cinq provinces, préfigure le sort qui attend le monde arabe tout entier, y compris l’Égypte, la Syrie, l’Irak et toute la péninsule Arabe. Au Liban, c’est un fait accompli. La désintégration de la Syrie et de l’Irak en provinces ethniquement ou religieusement homogènes, comme au Liban, est l’objectif prioritaire d’Israël, à long terme, sur son front est ; à court terme, l’objectif est la dissolution militaire de ces États. La Syrie va se diviser en plusieurs États, suivant les communautés ethniques, de telle sorte que la côte deviendra un État alaouite chi’ite ; la région d’Alep un État sunnite ; à Damas, un autre État sunnite hostile à son voisin du nord ; les druzes constitueront leur propre État, qui s’étendra sur notre Golan peut-être, et en tout cas dans le Hourân et en Jordanie du Nord. Cet État garantira la paix et la sécurité dans la région, à long terme : c’est un objectif qui est maintenant à notre portée».

[...]

Mr le Président, Pour finir, laissez-moi vous prier vivement de chercher à vous rendre personnellement compte, de tout ce dossier, et à mesurer la responsabilité que vous y assumez, avant qu’il ne soit trop tard.

Un ami, prêtre français, fin connaisseur de la Syrie, le Père Jean-Paul Devedeux, vient de vous écrire en ce jour même. Sa lettre est une invitation pressante qu’il vous adresse, pour une meilleure connaissance des Arabes, en général, et de la Syrie, en particulier. L’enjeu est de taille.

Veuillez, donc, vous libérer du «rôle» que vous êtes en droit de rechercher, et, surtout, de celui que l’on cherche, immanquablement, à vous imposer.

La Syrie, « seconde patrie de tout homme civilisé » comme l’a si bien dit votre grand savant «André Parot», et terreau de toutes les civilisations, mérite une visite. Elle ne manquera pas de vous étonner, et même de vous captiver. Ayez le courage de la connaître de près. Vous en reviendrez porteur d’un projet de politique nouvelle, clairvoyante et juste, faite d’équilibre humain, qui repose sur les droits et devoirs de TOUS, à l’égard de TOUS ! La vie, la liberté et la dignité sont, pour TOUS !

Nouveau Président de la France, Je vous souhaite d’en prendre l’initiative. Vous n’y serez pas perdant autant que vous l’êtes, en ce moment, et moins que vous le serez demain, si vous vous défilez !

Mr le Président, En vous confiant cet espoir, je vous dis mon respect.

Pr. Elias ZAHLAOUI Église Notre-Dame de Damas Koussour – Damas