Léon Landini
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- Catégorie : Politique
Léon Landini
Léon Landini, ancien F.T.P. M.O.I., Officier de la légion d’honneur !
Mesdames, Messieurs, très chers amis.
C’est un très grand honneur pour moi, de prendre la parole dans ce haut lieu de la Résistance armée, que fut le Plateau des Glières. (..)
Je ne vous cacherais pas non plus, que je suis heureux de représenter en ce lieu mythique, l’Amicale des Anciens FTP-MOI du bataillon Carmagnole-Liberté.
Carmagnole-Liberté, unité de laquelle Charles Tillon, Commandant en chef de tous les FTP de France, déclara : "Un des plus beaux fleurons, si ce n’est le plus beau fleuron de la Résistance armée française ».
Je me suis engagé en Résistance en 1941, cela fait 69 ans que je milite.
Au crépuscule de ma vie, c’est avec une grande fierté que je me penche sur mon passé.
Même en le regardant avec un oeil critique, NON Je n’ai rien à regretter. En toutes circonstances je me suis toujours trouvé du côté des plus pauvres, des malheureux, des exploités, des anticolonialistes, des antiracistes, en un mot toujours du bon côté de la barricade. A 84 ans, malgré l’âge, la maladie et la fatigue et « Avant que j’ai dû boucler mes valises et qu’on m’ait poussé dans le dernier train », comme dit une chanson de Jean Ferrat, je souhaite démontrer que je garde encore en moi ce même idéal, cette même flamme, cette même volonté de changer ce monde, qui permit à beaucoup de mes camarades de tomber face à l’ennemi en criant : « Vive la Liberté ! Vive la France ! vive le Parti Communiste ! ».
Ils sont tombés, animés par un idéal, qui permettait à un homme ou à une femme de se sublimer et de se sublimer à son insu. Ils sont tombés, convaincus qu’ils donnaient leur vie pour un monde meilleur.
Ils combattaient pour libérer :
La France, pays de la Liberté et des droits de l’Homme
La France de la Révolution.
La France de la Commune.
La France, le seul pays au monde où les bâtiments publics portent ces trois mots :
« Liberté – Egalité – Fraternité ».
C’est pour ces raisons, que nos parents fuyant les persécutions fascistes de Mussolini, Hitler, Franco et consorts avaient choisi ce pays pour s’y réfugier.
Internationalistes, c’est aussi pour ces raisons que sur notre maquis flottait le drapeau tricolore de Valmy. Drapeau, que nous n’avions pas eu à l’époque la sottise d’abandonner aux pétainistes qui prétendaient usurper la Nation, comme aujourd’hui certains l’abandonnent au Front National.
Mais pour nombre d’entre nous, héritiers de la Commune, admirateurs de Lénine, de la révolution d’octobre et de l’Armée Rouge, qui a d’écrasé l’armée nazie à Stalingrad, nous arborions aussi le drapeau rouge frappé de la faucille et du marteau.
Nous combattions parce-que nous étions certains que nous n’allions pas mourir pour rien, que les survivants sauraient porter haut le drapeau de la Liberté, de la justice et de la solidarité.
Je suis fier de 52 de mes frères de combat, qui ayant subi d’effroyables tortures, sont morts dans les culs de basse fosse de la police, de la milice ou de la Gestapo, sans avoir lâché un seul mot à Barbie et à ses sbires.
Pour certains, nous n’avons jamais retrouvé leurs corps. Oui ! Je suis fier de ces hommes et de ces femmes qui, pour la défense de leur idéal, ont su supporter l’insupportable. Fier aussi de mon ami Raymond Grynstein, qui à l’âge de 20 ans a préféré se faire sauter avec une grenade, en entraînant avec lui dans la mort les soldats nazis qui l’entouraient, plutôt que de se faire prendre vivant.
Fier également de mon camarade Simon Frid, lui aussi âgé de 20 ans, qui a été condamné à mort par un tribunal des « Sections Spéciales ». Exécuté le 4 décembre 1943, il refusa en arrivant devant la guillotine, que ses gardiens le soutiennent, en leur disant :
« Vous allez voir comment sait mourir un jeune communiste » et il se présenta tout seul devant la machine à couper les têtes.
Au moment précis où le couperet tomba, tous les internés de la prison Saint-Paul à Lyon, communistes et non communistes, debout dans leurs cellules, lui rendirent un vibrant hommage en chantant la Marseillaise et l’Internationale.
J’ajouterai que le 24 août 1944, au moment où éclata l’insurrection de Villeurbanne, alors que je me trouvais prisonnier au Fort Montluc et que mes compagnons de Carmagnole se battaient dans les rues de cette ville, les 950 internés de cette sinistre prison, enfoncèrent les portes de leurs cellules en chantant la Marseillaise et l’Internationale, avant même que les nazis n’aient complètement évacué le Fort-Montluc, où ils avaient commis tant de crimes .
Il arrive parfois, qu’on me reproche d’avoir l’outrecuidance, de la part d’un ancien résistant, déjà encombrant en tant que tel, de ne pas me contenter de n’être qu’un ancien résistant. Je me comporte paraît-il en octogénaire qui, loin de s’assagir avec l’âge, je suis comme les mulets des Alpes, plus rétif encore en devenant vieux. Tout vient sans doute de ce que, si je suis attaché au passé, ce lien est plus fait d’idéologies fondamentales que de souvenirs de guerre et que mon devoir de mémoire du passé, s’est inversé en devoir d’avenir.
Schématiquement, plutôt que de cultiver mon passé de résistant, j’ai choisi de le prolonger de façon militante dans la vie d’aujourd’hui. Car ce qu’il nous faut absolument garder en mémoire, bien plus que les crimes que nous avons subis, bien plus que nos faits d’armes, c’est la raison majeure qui nous les a fait accomplir.
Et cette raison majeure s’appelle l’antifascisme ! Et c’est en cela que la Résistance est un évènement capital pour la France et pour l’humanité. C’est pour cette raison, que les anciens résistants, survivants de cette tragique épopée, considèrent comme un devoir, d’être à nouveau à la pointe du combat, contre tout ce qui peut porter atteinte aux acquis, mis en place lors de l’application du programme du Conseil National de la Résistance.
Oui ! Nous avons le droit et le devoir de nous mettre en colère et de nous insurger contre la destruction systématique de tous ces acquis. Destruction effectuée au nom d’une Europe que 55 % des français, ont rejeté il y a 5 ans, en mai 2005.
C’est d’ailleurs, au nom de cette Europe, qui devait nous apporter la paix, le travail, le bien être pour tous, qu’aujourd’hui on nous impose la disparition de la totalité de nos services publics. Cette Europe et son euro, dont le seul but est d’enrichir les plus riches, ne peut en aucun cas devenir sociale, comme certains le prétendent.
Par ailleurs, voici qu’après des mois de tergiversation, cette semaine, les médias nous annoncent triomphalement que l’Union Européenne va débourser des centaines de milliards pour la Grèce. Mais en compensation, une rigueur extrême frappe déjà le peuple grec, toutefois cette rigueur ne touchera pas, bien au contraire, les grands financiers et actionnaires grecs et non grecs, qui sans aucune pudeur poussent des cris de joie, car avec cette manne les Bourses flambent, en un seul jour le cac 40 a pris prêt de 10 %.
Et que l’on ne s’illusionne pas, la rigueur que l’on applique aujourd’hui aux Grecs, nous est réservée et déjà ce mot fait tous les jours l’objet de débats dans nos médias, c’est d’abord le Portugal, puis l’Espagne et la France suit.
Quand à l’avenir de notre France, comment ne pas être frappé par l’aspiration qu’exprimait alors le Général de Gaulle, lorsqu’il déclara le 23 avril 1943 à Alger :
« Un régime économique et social tel qu’aucun monopole et aucune coalition ne puissent peser sur l’Etat, ni régir le sort des individus, où, par conséquent, les principales sources de la richesse commune soient ou bien administrées, où, tout au moins, contrôlées par la nation, où chaque français ait, à tout moment, la possibilité de travailler suivant ses aptitudes, dans des conditions susceptibles d’assurer une existence digne à lui et à sa famille. Un tel régime politique, social, économique, devra être conjugué avec une organisation internationale des rapports entre toutes les nations, telles que, dans un monde dont l’interdépendance est désormais la loi, chaque peuple puisse se développer suivant son génie propre et sans subir aucune oppression politique ni économique ».
C'est ce qui me fait dire que le seul moyen de sortir de cette oppression politique et économique que fait peser sur nous l’Union Européenne et son euro, et bien c’est de s’ en sortir.
D’ailleurs, sortir de l’euro n’est plus un sujet tabou, puisque dans un récent sondage, 69 % des français ont déclaré qu’ils regrettent le Franc. Nous pouvons constater qu’avec la crise qui frappe actuellement notre pays, que c’est toujours en direction de la France d’en bas que les coups les plus durs sont portés.
Tout est remis en cause, en ce moment même ce sont nos retraites : « Un des grands acquis de la Résistance » que nos gouvernants sont en train de réduire en une peau de chagrin.
Il n’y a pas d’argent nous dit-on, et bien, à ce sujet, permettez-moi de vous rappeler que peu de temps après l’élection de Sarkozy, Président de la République, le premier ministre nous annonçait, que la France était à la veille d’un dépôt de bilan.
Information que le Président de la République confirmait, en déclarant qu’il ne pourrait pas, comme il, l’avait promis pendant la campagne électorale, augmenter le pouvoir d’achat, car les caisses de l’Etat étaient vide.
On est en droit de se demander, comment ne s’en était-il pas aperçu, pendant les diverses années où il avait été ministre, y compris des finances ?
Cela étant, voici que comme par la vertu du Saint Esprit, des centaines de milliard d’euros sortent de leur cachette et sont distribuées aux banques et aux grandes entreprises. Ces mêmes banques et entreprises, qui après avoir bénéficié de cette manne et afin d’augmenter les dividendes de leurs actionnaires, s’empressent de licencier des dizaines de milliers de leurs employés les plongeant dans la misère et dans la désespérance.
En même temps, nous apprenons que ces banques et ces entreprises allouent des dizaines de millions d’euros de primes exceptionnelles, à leurs dirigeants, alors que tout démontre que ce sont eux les responsables de la crise.
En ce moment même, plus de 600 000 jeunes de moins de 25 ans sont au chômage, soit 23 % de la jeunesse de notre pays qui se trouve à la dérive.
Plus de 2 500 000 travailleurs sont au chômage et plus de 8 millions de français vivent sous le seuil de pauvreté.
Et comme pour se moquer de la misère du peuple, voici que Sarkozy, homme-lige du MEDEF, préconise de travailler plus pour gagner plus. Non ! Ce n’est pas pour ce monde là, que nous avons mené tant de combats et accepté tant de sacrifices.
Que faire ? Devons nous continuer à baisser la tête, ou devons-nous à l’exemple des Résistants, « qui donnèrent leurs vies avant le temps », reprendre la lutte pour donner à notre peuple, la possibilité réelle de décider par lui-même de ce que devra être son avenir ?
Notre devoir est de défendre notre souveraineté nationale et de chasser de notre horizon ces coalitions d’intérêts privés qui menacent notre devenir.
Il nous faut défendre notre république, une et indivisible, défendre notre industrie, nos universités, notre laïcité et même et y compris notre langue mise à mal par les tenants du tout anglais.
Pour défendre tout cela entrons en Résistance, car comme l’avais dit Lucie Aubrac, la Résistance se conjugue au présent et le temps est venu de démontrer que le peuple français ne sera jamais un peuple d’esclaves.
Hommage et respect à tous ceux et à toutes celles qui ont tout sacrifié pour que les survivants soient heureux.
Vive la Résistance d’hier et que vive la Résistance d’aujourd’hui